Stay beautiful... {Aaron

C'était le milieu d'après-midi. Joey avait fini ses cours, ne s'ennuyait presque pas et n'écumait presque pas les couloirs dans le but d'y croiser Aaron. J'ai dit presque pas, mais bon, on ne peut pas tout avoir non plus! Faut pas pousser mémé dans les orties, comme dirait l'autre. Joey ne pouvait pas être loin de chez elle, bonne élève et en plus sage comme une image. Il fallait bien qu'à un moment ou à un autre, quelque chose coince! Soit. Elle aurait retourné ciel et terre pour le retrouver, mais l'information devait rester secrète, je compte sur vous pour ne rien divulguer.

Après trente minutes d'errance dans les couloirs vides et froids du lycée, elle tourna, par hasard, au coin du foyer. Et la lumière se fit soudain. Il était là, assis à une table, il lisait un livre qu'elle ne put reconnaître de loin. Il était concentré, un mince sourire dessiné sur ses lèvres magnifiques. L'histoire devait être amusante ou attendrissante. Elle resta deux longues minutes, qui lui parurent trois secondes, le nez collé à la vitre, admirant, béate, le visage angélique qui se dédiait aux pages roussies de ce vieux livre. Si beau, il était si beau... Du bout des doigts elle caressa le verre à la place de son visage, sa main tremblait. La gorge serrée elle murmura un "je t'aime..." si bas, qu'elle-même ne put l'entendre. La seule preuve qu'elle avait parlé restait la buée déposée sur la vitre.
Elle secoua la tête. Elle ne pouvait pas l'aimer, elle ne le connaissait pas. Soudainement elle avait une rage contre elle-même incroyable. Sa naïvetait l'exaspérait! Mais le sourire d'Aaron s'élargit et toute tentative de recul fut immédiatement éclipsée. Poussée par un besoin inexprimable d'entendre sa voix et de sentir son odeur, elle entra dans le Foyer, déjà baigné de l'irrésistible fragrance.

- Salut Aaron, lança-t-elle timidement, les joues rosies.

Lorsqu'il se leva et qu'elle put à son gré admirer sa carrure, un large sourire s'étendit sur le visage de Joey. Puis il s'état avancé et l'avait serrée doucement contre lui, simplement pour la saluer, juste l'espace d'une fraction de seconde, simplement par habitude, juste machinalement. bC'était un geste anodin qui peut-être n'avait aucun sens dans la vie de tout les jours, mais qui, dans ce cas précis représentait une véritable béatitude, implantée dans le coeur de la jeune brune aux yeux océaniques. Il s'était éloigné à nouveau bien rapidement et elle lui sourit à nouveau pour éviter que la gêne ne s'installe.

Aaron. Salut Joey. Tu.. tu vas bien ?

Elle ne put empêcher son coeur de s'accélérer bêtement en réalisant qu'il s'était souvenu de son prénom, mieux, qu'il se demandait comment elle allait. Avec lui, le ridicule s'accroissait de jours en jours. Mais Joey commençait à penserqu'il vallait mieux s'en accomoder, puisqu'elle n'était pas en mesure de changer la situation.

- Ca va. Je trainais dans les couloirs, je m'attendais pas à te croiser... Ca va, toi?

Oh, elle savait que ce genre de petit mensonge ne faisait de mal à personne. Et puis, ridicule certes, mais pas trop. Elle n'allait pas lui avouer qu'elle espérait tomber sur lui et qu'ils puissent passer un peu de temps à deux.

Elle vint s'asseoir en face de lui, de l'autre côté de la table. Pas une seule seconde elle ne le quittait des yeux. On ne sait jamais avec les mirages, ils peuvent disparaître à tout moment. Alors autant en profiter un maximum tant qu'ils sont là. Elle lu attentivement le titre du bouqin, en effet, elle avait dû le lire pour les cours deux ans plus tôt et... Elle s'était arrêtée au cinquième chapitre. Le profs, parfois, avaient vraiment des lectures farfelues...

Aaron. Toi non plus tu n'as plus de cours ?
- Non, j'ai fini ce matin. Mais je suis en internat ici. Alors forcément, je trainasse dans les couloirs, ça m'évite de m'enraciner dans ma chambre. Je te l'ai dit, je m'ennuie facilement.

Elle soupira en repensant à cette sordide histoire d'internat. Elle s'était battue jusqu'au bout pour avoir un appartement, un studio même s'il le fallait, elle se serait arrangée de n'importe quoi à partir du moment où ce n'était pas à l'intérieur du lycée. Mais sa mère n'en avait pas démordu et elle se retrouvait dans la pire situation imaginable. En internat dans un pays étranger sans personne qui l'aime.

- Je voulais un appart'. Pour être tranquille avoir un peu mon "chez moi" la possibilité de sortir quand ça me chante gérer ma vie comme je l'entend...

Aaron. Ca viendra, tes parents sont aussi durs que ça ? Enfin, désolé, ça ne me regarde pas.

Joey haussa les épaules. Ce n'était pas, à ses yeux, une information que l'on pouvait classer secret défense... Il était de notoriété publique que sa maire était une insupportable bêcheuse coincée et réactionnaire. Certains allaient même jusqu'à des termes moins élogieux et Joey ne se cachait pas d'en être parfois, lorsqu'elle se plaignait auprais de Camilla, sa meilleure amie.

- Mon père est surtout très absent, il préfère partir en week-end avec sa serétaire que de se demander si je loge en appartement ou en internat. Il est extrêmement gentil avec moi et responsable, c'est un bon père. Mais il se contre fiche de ce genre de détail. Ma mère en revenche... C'est un Marins. Quand elle donne un ordre aucune tentative ne la fera plier. Quand je m'oppose à son jugement j'ai l'impression d'essayer d'abattre la muraille de chine avec une petite fronde.

A nouvau elle haussa les épaules et soupira de résignation. Elle se leva pour s'approcher de la fenêtre et laisser son regard couler sur la cours vide, les arbres et le bitume gris. Elle voyait les feuille voler et l'herbe s'écraser, signe que le vent dehors se déchaînait. En effet, on pouvait l'entendre siffler dans les coins de la vieille bâtisse.

*Quel temps sinistre...*

pensa-t-elle sans pour autant le dire à voix haute. Cette image de grisaille et de bourrasques la gela jusqu'aux os et elle frissonna.

- J'ai froid, murmura-t-elle, assez fort pour qu'Aaron l'entende.

Bien sûr elle avait l'habitude du froid, à New Yourk, il neigeait à Noël. Mais l'habitude n'amène pas le plaisir.

JOEY ;; « Mon père est surtout très absent, il préfère partir en week-end avec sa serétaire que de se demander si je loge en appartement ou en internat. Il est extrêmement gentil avec moi et responsable, c'est un bon père. Mais il se contre fiche de ce genre de détail. Ma mère en revenche... C'est un Marins. Quand elle donne un ordre aucune tentative ne la fera plier. Quand je m'oppose à son jugement j'ai l'impression d'essayer d'abattre la muraille de chine avec une petite fronde. »

Je la regardais. Ca me faisait toujours bizarre d'entendre des discours pareils. Je n'avais jamais eu de problèmes avec mes parents, ma famille. Je savais, que j'avais certainement les meilleurs parents du monde, et je le répétais sans cesse à ma mère. Et puis tout ce que je voyais autour de moi, ne faisait que renforcer cette image des parents parfaits que j'avais, même si, comme dans toute famille qui se respecte, il y avait pas mal d'embrouilles, mais c'était normal. Je ne savais pas vraiment quoi lui répondre, de peur de la froisser, ou de dire quelque d'inapproprié, alors je me taisais.

Elle se levait pour aller près de la fenêtre, j'avais du toucher une corde sensible quand même, je m'en doutais.

JOEY ;; « J'ai froid. »

Elle avait dit ça tout doucement, mais j'avais l'impression, qu'elle avait voulu que je l'entende quand même. Je ne pouvais pas la laisser comme ça. Je me levais et attrapais ma veste que j'avais déposée sur le dossier de ma chaise, et m'approchais d'elle, avant de la lui poser sur les épaules, que je frictionnais doucement. Sans vraiment m'en rendre compte, je l'avais rapprochée de moi, et n'avais pas bougé d'un pouce.

Joey sentit son coeur et son estomac se serrer à l'unisson lorsque la douce et appaisante odeur que véhiculait Aaronl'enveloppa toute entière. Elle ferma les yeux et sourit, le visage toujours tourné vers l'extérieur fantômatique, lorsqu'il frictionna ses fines épaules. Elle se réchauffait. Elle se réchauffait vite et elle se réchauffait de l'intérieur. C'était son coeur, c'étaient ses lêvres, c'étaient ses mains qui commençaient à lui brûler. Comme cette sensation était délicieuse... Cette parfait douceur qui l'enveloppait chaque fois qu'il se rapprochait d'elle, chaque fois qu'il la touchait. Cette béatitude à l'idée qu'il la tienne contre lui. Et surtout, cette impression d'être lovée, protégée par un cocon de tendresse et de sincérité. S'il y avait une chose qu'elle ne regrettait pas de New York, c'était bien cette hypcrisie qui reignait et faisait rage dans tout l'Upper East Side. Lorsqu'on n'est entourés que d'individus qui veulent avoir le plus possible de pouvoir, on ne peut faire confiance à personne. Ici, à Bristol, avec Aaron en particulier, elle avait n'avait plus l'impression que tout ce qu'elle dirait pourrait être retenu contre elle. Elle ne se sentait pas obligée de ne parler qu'en présence de son avocat. C'était incroyablement relaxant. dans cet instant de détente, elle se laissa aller à poser sa tête doucement sur l'épaule du jeune homme, dans un mince soupir de bien être.

Précieux. C'était l'ajectif que Joey aurait attribué à ce baiser. Précieux et inestimable. C'était comme voir son père heureux ou pleurer après une dispute avec sa meilleure amie. Rassurant et libérateur. Ses lèvres étaient douce, chaudes, exactement comme elle les avait imaginées, comme elle les avait rêvées. Elles étaient sucrées et innocentes.

Pouvait-il imaginer l'erreur qu'il venait de faire en gravant ainsi au plus profond de la petite Joey, encore trop jeune pour aimer, le désir d'une histoire chevalerseque comme celles qu'on ne lui avait jamais lues pour l'endormir?
Pouvait-il croire qu'il avait inscrit en elle, par le simple contact de ses lèvres, l'espoir secret de lui appartenir à jamais?
N'était-il pas trop jeune pour comprendre qu'on ne joue pas au chat et à la souris avec une enfant à la recherche du prince charmant?

Joey non plus ne privilégiait pas la prudence. Seule et loin de chez elle, elle était constamment sur la déffensive. Alors, oui, quand finalement elle eut la possibilité de se bercer de la douce illusion que ces rêves, d'amour indestructible, puissent se confondre avec la réalité, elle n'essaya pas de se préserver d'une éventuelle chute. Elle se plongea juste dans cette étreinte à corps perdu, ressentant chaque mouvement qu'il faisait avec une intensité toute particulière.

Lorsqu'il mit fin à leur tendre baiser, elle n'ouvrit pas immédiatement les yeux, encore retenue par ses rêves. Mais elle ne tarda pas à plonger à nouveau son regard bleuté dans celui, sombre et à présent attendit (ou était-ce de l'incertitude?) d'Aaron. Aveuglée par cette adoration qu'elle lui vouait, elle ne pris pas garde à ses hésitations et caressa doucement son visage en souriant. Elle ne dit pas un mot. La perfection d'un instant ne peut s'exprimer par la parole.

Le bruit attroce d'une vitre qui se brise et de tout le verre qui tombe sur le sol dans un vacarme horrible raisonna dans la tête de Joey. Elle sursauta, revenant sur terre à la phrase, si tant est qu'on puisse appeler ça une phrase, d'Aaron. Bon, il était plutôt maladroit comme prince charmant. Mais dans la pratique en elle-même, il se débrouillait très bien! Un rire ridicule échappa à la demoiselle, secouant doucement ses épaules.

Puis ses joues s'enflammèrent et elle baissa les yeux. Elle se sentait soudainement mal à l'aise. Il y avait une chose dont elle était certaine: elle ne méritait pas Aaron. Elle et Camilla avaient fait, sans vraiment s'en rendre compte, beaucoup de mal autour d'elles et depuis que Joey avait pris conscience de cet était de fait, elle ne se considérait plus comme une "bonne personne". Or Aaron méritait plus encore qu'une "onne personne". C'était certain.

Elle croisa les bras contre elle, comme pour se protéger, comme pour s'interdire le bonheur des gestes qu'elle s'apprétait à faire, et s'éloigna un peu du jeune homme, marchant quelques secondes à travers le foyer. Mais elle commit une erreur dans sa démarche. Après avoir fait cinq pas, elle se retourna pour le regarder un instant. Submergée par ses sentiments, elle se rua vers lui et le serra contre elle de toutes ses ridicules forces d'enfant, cachant son visage dans le cou de son idôle...

- Wow... Répéta-t-elle simplement, un large sourire sur les lèvres.

C'est alors qu'apparut une jeune fille qui n'était pas habillée de vêtements noirs. Elle portait une jarre qui reposait sur son épaule et avait un voile autour de la tête; mais son visage était découvert. Le jeune homme s'avança vers elle pour l'interroger au sujet de l'Alchimiste.

Et ce fut comme si le temps s'arrêtait, comme si l'Âme du Monde surgissait de toute sa force devant le jeune homme.
Quand il vit ses yeux noirs, ses lèvres qui hésitaient entre le sourire et le silence, il comprit la partie la plus essentielle et la plus savante du language que parlait le monde, et que tous les êtres de la terre étaient capable d'entendre en leur coeur. Et cela s'appelait l'Amour, quelque chose de plus vieux que les hommes et que le désert même, et qui pourtant resurgissait toujours avec la même force, partout ou deux regards venaient à se croiser comme se croisèrent ces deux regards près d'un puits.
Les lèvres enfin se décidèrent pour un sourire, et c'était là un signe qu'il avait attendu sans le savoir pendant un si long temps de sa vie, qu'il avait cherché dans les livres et auprès de ses brebis, dans les cristaux et dans le silence du désert.
Voilà, c'était le pur language du monde, sans aucune explication parce que l'Univers n'avait besoin d'aucune explication pour continuer sa route dans l'espace infini. Tout ce qu'il comprenait en cet instant, c'était qu'il se trouvait devant la femme de sa vie, et sans la moindre nécessité de paroles, elle aussi devait le savoir.

Paulo Coelho, l'Alchimiste

Elle releva la tête, cet indescriptible sourire figeant toujours ses lèvres, et le regarda une seconde. Elle chercha, au fond d'elle-même, quelque chose à répondre à ce garçon. Pouvait-elle lui avouer que depuis des semaines ses nuits n'étaient peuplées que de lui? Aurait-il était correcte ou, pour le moins, sensé de lui avouer que le coeur sec et inutile qui jusqu'alors avait battu sans raison au fond d'elle, avait trouvé, en lui, l'unique et éternelle motivation pour faire chaque jours un pas de plus dnas l'obscure destinée? Il était certain qu'il ne pourrait pas comprendre qu'une jeune fille, dont il ne connaissait pas même le nom de famille, avait rêvé de lui des nuits et des nuits sans jamais s'en lasser. Qu'avant même d'avoir pu entendre le son de sa voix, elle avait imaginé la douceur de ses mains et le goût de sa peau. Qu'ils n'étaient personne l'un pour l'autre et que, pourtant, il était tout pour elle. Il ne pourrait pas imaginer l'accablante vérité. Alors, elle ne pouvait rien lui dire. Parce qu'il la croirait folle, s'il lui arrivait de dévoiler ses désirs envers lui.

Avec douceur et une précipitation mal dissimulée, elle posa à nouveau ses lèvres contre celles d'Aaron. Il n'y avait aucune autre façon de lui faire savoir, clairement, qu'un baiser de lui était tout ce qu'elle avait toujours voulu. C'était l'unique moyen qu'elle possédait pour qu'il sache que mille baisers seraient les bien venus et qu'un seul ne serait jamais mal pris. Parce qu'il était cette personne spéciale qui allumait, en elle, le feu d'une vie plus brillante et plus heureuse.